Valérie GOUTTE Avocat à la cour

Le recours à un expert

LE RECOURS À UN EXPERT-COMPTABLE POUR LES CONSULTATIONS RÉCURRENTES

  • en vue de la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise ;
  • en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise. L’expert-comptable exerce sa mission dans les conditions fixées par les articles L. 2315-89 et  L. 2315-90 du code du travail ; (
  • dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi ;

Il s’agit là des trois consultations récurrentes prévues par le code du travail.

Un accord d’entreprise, ou à défaut un accord conclu entre l’employeur et le CSE, adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel, détermine le nombre d’expertises dans le cadre des consultations récurrentes sur une ou plusieurs années.

LES AUTRES CAS DE RECOURS À L’EXPERT-COMPTABLE :

Le CSE peut désigner un expert-comptable dans les cas suivants :

  • 1° lorsqu’il est consulté dans le cadre d’une opération de concentration ;
  • 2° lorsqu’il fait usage de son droit d’alerte économique ;
  • 3° lorsque, dans une entreprise d’au moins 50 salariés, il est consulté dans le cadre d’un projet de licenciements collectifs pour motif économique concernant au moins dix salariés dans une même période de trente jours ; les règles particulières applicables à cette hypothèse de recours, par le CSE, à un expert figurent aux articles L. 1233-34 à  L. 1233-35-1 du code du travail ;
  • 4° lorsqu’il est consulté dans le cadre d’une offre publique d’acquisition.

L’expert-comptable exerce sa mission dans le cadre fixé par l’article L. 2315-93 du code du travail.

Le CSE peut également mandater un expert-comptable afin qu’il apporte toute analyse utile aux organisations syndicales pour préparer la négociation d’un accord visant à répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise ou à préserver, ou développer l’emploi ou d’un accord relatif au contenu du plan de sauvegarde de l’emploi.

Les cas de recours à un expert «habilité et :ou agréé» (article L. 2315-94 du code du travail) :

Le CSE peut faire appel à un expert habilité et/ou agréé :

  • 1° Lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement ;
  • 2° En cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ;
  • 3° Dans les entreprises d’au moins 300 salariés, en vue de préparer la négociation sur l’égalité professionnelle.

L’arrêté du 7 août 2020, en vigueur à compter du 21 août 2020, fixe les conditions et les modalités d’exercice des missions d’expertise dévolues à l’expert au titre de ces dispositions, ainsi que les procédures de certification de ces experts.

LE CAS DE RECOURS À UN EXPERT DIT « LIBRE »

Le CSE peut faire appel à toute expertise pour la préparation de ses travaux.

C’est ainsi qu’il peut faire appel à un expert-comptable dès lors que sa mission ne s’intègre pas dans les cas d’expertise légale, un avocat ou tout autre expert qui lui serait utile.

Dans ce cas, contrairement à ce qui est prévu dans les autres situations le coût de cette expertise est totalement à la charge du CSE (sauf accord plus favorable).

LE COUT DES EXPERTISES

La prise en charge de l’expertise décidée est soit à la charge exclusive de l’employeur, soit partagée entre l’employeur et le CSE, soit à la charge du CSE.

Le cout de l’expertise pris en charge par l’employeur :

Le coût de l’expertise est pris en charge par l’employeur lorsque le CSE décide de recourir à un expert :

  • en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise ;
  • dans le cadre de la consultation récurrente sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi ;
  • lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement ;
  • en cas de licenciements collectifs pour motif économique.
  • en cas d’expertise en vue de préparer la négociation sur l’égalité professionnelle, dans les entreprises d’au moins 300 salariés et en l’absence de tout indicateur relatif à l’égalité professionnelle prévu à l’article L. 2312 18 du code du travail.

Le cout de l’expertise partagé entre l’employeur et le CSE

Le coût de l’expertise est pris en charge par le CSE, sur son budget de fonctionnement, à hauteur de 20 %, et par l’employeur, à hauteur de 80 %, lorsque le CSE décide de faire appel à un expert :

  • en vue de la consultation récurrente sur les orientations stratégiques de l’entreprise ;
  • dans le cadre des consultations ponctuelles (introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, opérations de concentration, droit d’alerte…,) à l’exception de celles qui font l’objet d’une prise en charge intégrale par l’employeur (identification d’un risque grave dans l’établissement, projet de licenciements collectifs pour motif économique, voir ci-dessus).

Néanmoins, l’employeur prendra intégralement en charge ces expertises lorsque le budget de fonctionnement du CSE est insuffisant pour couvrir le coût de l’expertise et n’a pas donné lieu à un transfert d’excédent annuel au budget destiné aux activités sociales et culturelles prévu à l’article L. 2312 84 du code du travail au cours des trois années précédentes].

Le cout de l’expertise à la charge totale du CSE

Les autres expertises décidées par le CSE (expertise menée par un expert dit « libre » est à la charge totale du CSE et doivent être réglées sur le budget de fonctionnement.

DÉSIGNATION DE L’EXPERT

Tout d’abord, la décision de recourir à un expert, et le choix de cet expert, appartiennent au CSE.

Pour ce faire, la décision du principe de l’expertise et la désignation de l’expert doit être à l’ordre du jour de la réunion au cours de laquelle l’expert sera désigné. Le secrétaire qui prépare l’ordre du jour avec le président doit inscrire parmi les autres points à l’ordre du jour la mission qui aura été choisie.

A compter de la désignation de l’expert par le comité, les membres du comité établissent au besoin et notifient à l’employeur un cahier des charges. De son côté, l’expert ainsi désigné doit notifier à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée d’expertise, dans un délai de dix jours à compter de sa désignation

LE DÉROULEMENT DE L’EXPERTISE ?

Pour les besoins de leur mission, les experts ont libre accès dans l’entreprise (cette disposition n’est toutefois pas applicable aux experts « libres » mentionnés ci-dessus).

L’employeur doit fournir les informations qui leur sont nécessaires. Ils doivent pour cela, au plus tard dans les trois jours qui suivent leur désignation, demander à l’employeur toutes les informations complémentaires qu’ils jugent nécessaires à la réalisation de leur mission. L’employeur répond à cette demande dans les cinq jours.

A l’instar de ce qui est prévu pour les membres de la délégation du personnel du CSE, les experts sont tenus au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication et à une obligation de discrétion à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur.

LES DÉLAIS POUR L’ÉTABLISSEMENT DU RAPPORT ET SA REMISE

Le rapport établi par l’expert doit être remis au plus 15 jours avant l’expiration des délais de consultation du comité social et économique (2 mois ou 3 mois si expertise CSE central), dans le cadre d’une consultation.

Ces délais peuvent être différents selon la nature de l’expertise (plan de sauvegarde de l’emploi par exemple) ou par accord.

Pour les autres expertises (notamment, risques graves et exercice du droit d’alerte économique), à défaut d’accord d’entreprise ou d’accord entre l’employeur et le CSE, adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel, l’expert remet son rapport dans un délai de deux mois à compter de sa désignation. Ce délai peut être renouvelé une fois pour une durée maximale de deux mois, par accord entre l’employeur et le CSE.

LES CONTESTATIONS PAR L’EMPLOYEUR

Lorsque l’employeur entend contester le principe, le choix de l’expert, le cout de l’expertise et/ou la durée ou le périmètre de la mission, il doit (sauf cas particulier de licenciement collectif pour motif économique) saisir le Président du Tribunal Judiciaire dans un délai de dix jours à compter de :

  • 1° La délibération du CSE décidant le recours à l’expertise s’il entend contester la nécessité de l’expertise ;
  • 2° La désignation de l’expert par le CSE s’il entend contester le choix de l’expert ;
  • 3° La notification à l’employeur du cahier des charges et des informations qui lui sont transmises par l’expert (coût prévisionnel, durée…) s’il entend contester le coût prévisionnel, l’étendue ou la durée de l’expertise ;
  • 4° La notification à l’employeur du coût final de l’expertise s’il entend contester ce coût.

La saisine du juge suspend l’exécution de la décision du comité, ainsi que les délais dans lesquels il est consulté jusqu’à la notification du jugement.

Le juge statue, suivant la procédure accélérée au fond, en premier et dernier ressort (seul un pourvoi en cassation est possible), dans les 10 jours suivant sa saisine.

LE CAS DE LA CONTESTATION D’UNE EXPERTISE DANS LE CADRE D’UN LICENCIEMENT COLLECTIF POUR MOTIF ÉCONOMIQUE

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, lorsqu’un projet de licenciement pour motif économique concerne au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours, le CSE peut faire appel à un expert dans les conditions fixées par les articles L. 1233-34 à L. 1233-35-1 et R. 1233-3-3 du code du travail.

Dans ce cas, la contestation relative à l’expertise est adressée, avant transmission de la demande de validation ou d’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), à la DIRECCTE, qui se prononce dans un délai de 5 jours ;

La décision de la DIRECCTE peut être contestée devant le tribunal administratif qui statue dans un délai de trois mois.

Si, à l'issue de ce délai, il ne s'est pas prononcé ou en cas d'appel, le litige est porté devant la cour administrative d'appel, qui statue dans un délai de trois mois.

Si, à l'issue de ce délai, elle ne s'est pas prononcée ou en cas de pourvoi en cassation, le litige est porté devant le Conseil d'État. (Art. L. 1235-7-1 du code du travail).

En cas d’annulation définitive par le juge de la délibération CSE décidant le recours à l’expertise, les sommes perçues par l’expert sont remboursées par ce dernier à l’employeur.

Le comité social et économique peut, à tout moment, décider de les prendre en charge.

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